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La limonade J’étais assise là, à touiller ma limonade, devant Jerem. On regardait le port. On venait ici tous les jours, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige. Et puis il y avait ces quatre personnes qu’on observait toujours. Ma voisine et son meilleur ami et deux potes venant de la cité. On avait appris à les connaitre moi et Jerem, sans qu’eux ne nous connaissent réellement. On voyait tout. On discutait d’eux, tranquillement : « Shina va finir avec Laurent. — Haha tu rigoles ! moi je suis sûre que ça ne va pas tenir leur truc ! » On observait en rigolant. Shina et Laurent était assis dos à nous. Ils regardaient le port. Je posais ma tête contre l’épaule de mon ami. « N’empêche qu’ils vont bien ensemble, tu as raison. » il acquiesça en souriant, sans les quitter des yeux. Shina me gardait quand j’étais gamine. La fenêtre de ma chambre donnait sur la sienne. Avant, je l’espionnais tout le temps, et puis j’ai arrêté, rattrapé par les études. Jerem commanda deux nouveaux sodas. Le vent portait les paroles des deux amis regardant l’eau : « bon, on se voit ce soir Shina ? Il y a quelque chose que j’aimerais que l’on fasse… — Si tu veux, tu n’as qu’à passer chez moi. — Oui, je passerais, t’en fait pas, à ce soir ma belle. » Il lui posa un bisou sur la joue et se leva. Ils se regardèrent longuement. Puis, gênés, ils partirent tous deux dans des sens opposé. « Tu as vue Jerem ? Ça va être intéressant ce soir, tu dormiras chez moi ? — Si tu veux. Hey je ne t’ai pas dit ! hier soir, j’ai entendu Tom dire à Youssef qu’il l’aime ! — Intéressant, d’ailleurs, ils vont pas tarder. Il est presque 11h00. » On changeait de place pour aller au balcon. De là, on voyait la bute. « Les voilà ! » deux garçons aussi grand l’un que l’autre montaient les marches pour atteindre leur lieu de rendez-vous. Je plissais les yeux pour mieux voir. Ils regardèrent autours d’eux puis s’enlacèrent. Un rictus se forma sur mes lèvres. Jerem soupira d’amusement. Les deux amoureux s’embrassaient langoureusement. « Si les parents de Youssef l’apprennent, ils empêcherons leur fils de voir Tom, ça serait dommage. — Oui, c’est vrai, même si je ne suis plus intéressé par l’histoire de Laurent et Shina. — Tu donnes l’impression de parler d’un film Mèl haha ! — Et toi on dirait que tu veux tout pimenter, espèce de sadique. » Je lui décochais une tape amicale dans le dos. Il gloussa. « Bon écoute, ils ont l’air de se parler sérieusement. » on tendit l’oreille. « Tom, mon cœur, si mes parents savent qu’on est ensemble, ils vont sérieusement s’énerver. — Et mes parents m’ont toujours défendu d’aimer les hommes… — Il faut que nous fassions attention. — Oui. » Ils partirent côte à côte comme deux amis. Je soupirais, j’avais envie de voir de l’action. « Jerem, tes parents sont en déplacement non ? — Oui. Tu veux le hangar ? — Yep ! on va faire une fête. — Sérieusement ? — Ba oui, on va les inviter tous les quatre, et d’autres personnes, que ça fasse pas mouche. » Il hocha la tête. Son portable vibra. Un message de sa copine Lina. « J’arrive vendredi ». Son visage s’illumina. Elle habitait à 400 kilomètres de notre ville et ça faisait des mois que Jerem voulait la voir. « Fais les invitations, je m’occupe du reste Mèl. » il partit en me laissant seule. Notre matinée était fini. Je soupirais et sortis mon portable de ma poche. J’entrais le code. Quatre zéro. Et je regardais cette image qui me déchirait le cœur. Moi et lui. Tous les autres étaient amoureux. Moi, je n’en avais pas le droit. J’avais perdu cette chance. Je retins mes sanglots et rangeais mon portable avant de rentrer à la maison, là où personne ne m’attendais. … Jerem était arrivé. On était assis sur mon lit à regarder par la fenêtre. Dix mètres à peine séparait le mur de ma chambre à celui de l’immeuble d’en face. On voyait les ombres dans la chambre de Shina. En plus, la fenêtre était ouverte, seul un rideau laissait penser à une intimité. Je m’étais assoupi lorsque Jerem me pinça en me disant « ils sont dans la chambre ! — Huuum ? — Regarde et tais toi ! » Je m’exécutais. Les ombres de Shina et Laurent bougeaient dans la pièce. Je tendis l’oreille. « Je te paris 10 euros qu’il va lui demander d’être sa copine, me dit Jerem. » je hochais la tête, trop concentré sur ce que je voyais. Je sortis alors l’argent de ma poche et le tendis à mon ami. J’entendis alors « Shina, je t’aime. Je t’aime sérieusement. » Je souriais. C’est alors qu’ils commencèrent à s’enlacer, puis s’embrasser. Je gloussais. Jerem rougi légèrement. Puis l’ombre de Laurent enleva son haut, tout comme celui de mon amie. Ils s’embrassaient toujours. On sentait d’ici leur désir. Shina déboutonna son short qui tomba à ses pieds. Son petit ami glissa ses mains sur ses fesses, sur son dos, dans ses cheveux. Ils étaient collés. Laurent enleva alors son pantalon en toile et il se mit au-dessus de Shina sur le lit. On ne voyait plus que leurs mollets et leurs pieds. On devinait leurs jambes entremêlé et leurs corps qui allaient d’un instant à l’autre s’accorder. Je regardais Jerem qui me fixait alors de grands yeux brillants. Je regardais de nouveau par la fenêtre. Ils avaient l’air occupé. Des bruits résonnèrent dans mes oreilles. Je me raidis puis ferma ma fenêtre, gênée. Jerem éclata de rire à côté de moi. Il me dit alors « ça ça te gène ? Haha ! — Ben… oui. — Pouhahaha ! t’a jamais rien fait dans ce genre ? — Ben, non. — T’a vu des films au moins ! — Non. Ce n’est pas intéressant. — Et Théo il t’a rien montré de ça ?? Hahahahaha ! » Je le regardais avec des grands yeux. Je me remémorais tout ce qui s’était passé avec Théo. Je pensais alors à ce soir ou nous étions rentrés en riant et que tout s’était produit. Cette nuit magique. Je commençais à pleurer. Jerem se mordis la lèvre et me pris dans ses bras. « Désolé… » Je hoquetais. Il soupira et m’allongea sur mon lit. Puis je fermai les yeux. Puis plus rien, le sommeil m’avait rattrapé. … Nous étions vendredi. J’avais accompagné un peu à contrecœur Jerem à la gare pour chercher Lina. Lorsqu’elle arriva, ils s’enlacèrent très fort l’un contre l’autre. Ils s’embrassèrent. Je tournais le regard. Ce soir, il y aura cette petite fête. Je n’étais pas motivé. Je jetais un coup d’œil à la grande horloge. Il était 15h00. Jerem et Lina étaient partis sans m’attendre. Je les rattrapais en grommelant. On s’arrêta au café. On commanda trois sodas. Les deux amoureux discutaient, ravis. J’observais la bute. Youssef et Tom s’embrassaient. Je soupirais. Je finis par me lever et partir. Jerem ne me demanda pas de rester, il se contenta de me dire à ce soir. Je fis oui de la tête sans même me retourner. Arrivé à la plage, je remarquai Shina regardant l’eau. Je m’assis timidement à côté d’elle et commença la discute « tu viens ce soir ? — Ouai. — Ho, cool. » Elle ne disait pas grand-chose. J’essayai autre chose. « Quelque chose ne vas pas ? Tu m’as l’air inquiète. — J’ai couché avec Laurent. — Et alors ? c’est quoi le mal ? — Je crois que je suis tombée enceinte. — Ha. » Je la regardais gravement. Elle n’osait plonger son regard dans le mien. « Tu veux que je t’accompagne à la pharmacie ? On va acheter un test de grossesse si tu veux. — Si ça peut te faire plaisir. » On partit à pied sans rien dire. Elle regardait le sol. Arriver là-bas, j’ouvris la porte. Shina resta dehors. Je discutais un peu avec la pharmacienne, en jetant parfois des coups d’œil à mon amie. Je ressortis un quart d’heure plus tard avec deux tests. Un de grossesse, l’autre pour le SIDA. Tout le monde m’avait dévisagé. J’en rigolais. Je les passais à Shina qui me sourit légèrement. Je lui répétais les instructions de la pharmacienne et elle partit en me faisant un signe de la main. … J’arrivais en retard à la fête. Tout le monde était déjà là. Je les saluais tous et parti m’asseoir au bar en demandant une limonade. J’observai tout. Jerem et Lina dansaient coller-serrer. Youssef et Tom discutaient tranquillement. Laurent et Shina buvaient en rigolant. Je soupirai. La soirée semblait calme. … Il était minuit passé. Tout devenait plus chaud. Lina et Jerem étaient rentrés à l’appart. « Je vais lui montrer ma chambre. » j’avais gloussé lorsque mon ami m’avait dit ça. J’étais toujours seule à les observer. Shina discutait avec Youssef. Elle lui disait de prévenir ses parents de sa relation avec Tom. Je cherchais Laurent du regard. Il était dans un coin du hangar, en train de parler avec une fille. Il posa alors une main ses fesses et la jolie blonde l’embrassa. Ils s’embrassèrent langoureusement pendant au moins 5 minutes. Je tournais la tête, de dégoût. Shina arriva près de moi et me dit « le test de grossesse est positif… je vais devoir l’annoncer à Laurent. Tu sais où il est ? » J’hésitais. Mais voyant son regard insistant je hochais la tête du côté de son mec et la belle blonde qui s’embrassait. Mon amie se retourna vers moi, toute pâle. Elle s’évanouit alors. Je demandais a Tom de m’aider à la porter jusqu’au salon. Lorsqu’elle reprit ses esprits, elle vomit. Je la regardais avec pitié puis parti prendre une bassine. Je la lui tendis et elle vomit encore. Je soupirai. Une sonnerie retentit alors d’un joli sac en cuir. Je m’excusais auprès de Shina et décrocha. C’était le portable de Lina. « Allo ma chérie ? Tu rentres quand de chez ton cousin ? J’ai tellement hâte de te revoir ! — Allo ? excuse-moi, Lina est occupée, je le lui dirai. — D’accord merci ! — Der rien, a plus. — à plus ! » Je soupirais et retournais voir Shina. Elle pleurait. Je pris la bassine et la vida dans les toilettes. J’entendais ses sanglots. Je m’assis alors à côté d’elle et lui caressa l’épaule. « Ça va aller ? — il me trompe Mèl ! — je sais. — Je vais devoir le quitter ! je ne supporte pas ça ! — Tu devrais lui laisser une deuxième chance. — Non ! — On verra. » Je la regardais avec pitié. C’est alors que Lina et Jerem descendirent. Je regardai Lina. Elle me fit un sourire angélique. Je lui dis alors « ton copain à appeler, il me demande quand tu rentres de chez ton cousin et qu’il hâte de te revoir. » Jerem se figea en entendant mes mots. Sa petite amie détourna le regard, gêné. Je lui montrais le téléphone et rappelais le numéro en mettant sur haut-parleur. « Allo ? Ma puce ? Ta cousine t’a dit le message ? — Oui. — Génial ! j’ai hâte que tu rentres. Bon, je dois te laisser, bisous je t’aime. » Je raccrochais. Jerem regardais Lina avec des yeux horrifiés. « tu n’as pas oser ?.. — Je suis désolé… — Tu es sérieuse ?! — Excuse-moi… vraiment… — Dégage ! bouffonne ! » Je les regardais. Lina me bouscula, prit son sac et sorti de la maison. Shina s’était endormi. Jerem pleurait. Je le pris dans mes bras, caressa ses cheveux et le serra plus fort. Il hoquetait contre moi. Ses larmes avaient mouillé mon tee-shirt. Je le montais dans sa chambre, l’allongeais sur son lit et le laissais s’endormir. Lorsque je redescendis au hangar, il n’y avait plus personnes. Même Laurent était parti, sans doute avec la fille de tout à l’heure. Il était 3h00 du matin. Je rangeais tout et retournais à l’appartement. Arrivée sur mon lit, je me déshabillais, partis prendre une douche bien chaude et, en revenant, me glissais sous la couette avant de fermer les yeux. … Il pleuvait aujourd’hui. J’étais sorti au café. Jerem m’avait rejoint. On regardait Youssef et Tom. Ils discutaient tranquillement, à l’abri sous le phare. C’est alors que l’on vis les parents de Youssef arriver. D’un coup de coude à mon ami, je lui montrais la scène du doigt. « Encore un couple terminé. » il ne me répondit pas. Je n’insistais pas, continuais à regarder la scène. C’était une grande engueulade. Youssef se fit gifler par son père et ramener de force à la maison. Jerem parti, en me laissant seule. Il avait payé. Je soupirais. C’est alors que je vis Tom se pencher au-dessus de l’eau. Je sorti dehors. Arrivée à coté, de lui, j’étais trempé. Je lui demandai « tu vas sauter ? Si tu sautes la, tu vas mourir noyer. — C’est une bonne idée. » Je penchais la tête sur la côté et m’assis sur la bute. « Si tu sautes, j’aurais des problèmes, car je ne t’aurais pas secouru. — Si ce n’est que ça, alors je peux t’assommer. — Et si les parents de Youssef réfléchissent et acceptent votre relation ? — Mes parents m’ont banni de chez moi pour ça. Et ceux de Youssef déménage. Je n’ai plus rien. — Je comprends. Mais tu veux vraiment mourir ? — Oui. » Il me tira les cheveux violemment et ma tête heurta le béton. Il m’avait assommé. Et je l’avais laissé faire. … Lorsque je rouvris les yeux j’étais à l’hôpital. Jerem était à côté de moi. « Ça va mieux ? — Tom est là ? — Non, il s’est noyé, ils ont retrouvés son corps. — Ha. Je vais être interrogé ? — Oui. — Je vois. » L’infirmière me permit de sortir. On signa des papiers et je fus ramener chez moi. Puis quelques jours plus tard le téléphone de la cuisine sonna. C’était la police. On me demanda de venir, ce que je fis. Je croisais les parents de Tom, ils pleuraient et répétaient « mais qu’est qu’on a fait ! On aurait dû accepter cette relation ! » . Les policiers m’interrogèrent. Il voulait sauter, j’ai essayé de l’en empêcher, il m’a assommé. Je n’ai pas dit que je lui avais donné l’idée. J’avais oublié. Je rentrais chez moi et m’allongeais sur mon lit. Les pauvres. Je soupirais. … Je suis assise là, à touiller ma limonade, seule. Je regarde le port. Je viens ici tous les jours, qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige. Et puis il y a ces quatre personnes que j’observe toujours. Ma voisine, son copain et leur bébé et mon ancien meilleur ami. J’ai appris à les connaitre moi, sans qu’eux ne me connaissent réellement. Je vois tout. Je pense à eux. Le couple est heureux. Ils montrent les vagues au bébé. Jerem lui est sur la bute, il a le visage triste. Il ne vient plus avec moi, tant pis. Quelqu’un pousse la chaise devant moi, c’est Théo. Il me demande « tu vas bien ? — Oui et toi ? — Ça va. — Tu m’as manqué. — Toi aussi tu m’as manqué. » On se lève et on s’enlace. On s’embrasse. On est heureux. On s’aime. Eux aussi je pense, mais nous, on a compris que vivre l’un sans l’autre c’est dur. Il est revenu de sa pension. Plus d’erreurs. Plus rien. Maintenant, la chaise vide à côté de la mienne est de nouveau remplie et cette fois je vais pouvoir vivre mon histoire sans regarder celle des autres.